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Le port industriel entre dans les archives de l’histoire
A l’instar de nombreux projets publics imaginés pour la Vallée de la Seine, en particulier dans la boucle de Triel-sur-Seine, par nos édiles, ceux-ci ont fini par jeter l’éponge. Non seulement ce projet de port industriel était une aberration environnementale, mais il a fait perdre beaucoup de temps et d’énergie à tous les acteurs locaux. Voici quelques leçons historiques à retenir après ce nouveau fiasco.
« Cette fois, c’est terminé ! « , a constitué le début des remerciements de la cheville-ouvrière de cette longue contestation, M. Anthony Effroy. Ce citoyen de base était jeune et a gagné ses galons (et également pris des coups politiques) dans cette longue marche pour faire changer le cours de l’histoire locale.
Depuis 2010, MM. Pierre Cardo et Philippe Tautou, respectivement président et vice-président de la Communauté d’agglomération 2 Rives de Seine, qui s’est fondue dans la Communauté urbaine Grand Paris Seine & Oise (GPS&O), avaient présenté le projet de plateforme portuaire dont le développement aurait été « harmonieux » avec la nature et prometteur pour la création de produit intérieur brut (PIB) ! C’était le karma de tous les politiques du siècle dernier. Des réunions de pseudo concertation s’étaient succédé pour arriver à une proposition « gagnant-gagnant » pour les concitoyens.
La contestation d’abord
Toutefois, rien s’est passé comme prévu. D’abord, les travaux fluviaux et terrestres pour la livraison du quai à usage portuaire n’ont jamaisété entrepris. Ils devaient se terminer en 2018 pour un aménagement supplémentaire de 7 ha en 2030. En revanche, la contestation s’est organisée peu à peu pour aboutir à fédérer la majorité de habitants des communes impactées par le projet : Carrières-sous-Poissy, Triel-sur-Seine, Médan, Villennes-sur-Seine ont apporté des cohortes de manifestants, le 13 avril 2013, encore deux années plus tard sur la Seine (où 50 bateaux avaient arrêté, le 20 septembre 2015, leur transport fluvial). Ces manifestants avaient compris la globalité de ces « grands projets » qui bouleverseraient leur territoire. Or, les habitants de la Vallée de la Seine ont demandé et continuent à demander plus d’écoute en amont et plus de concertation. La manifestation du 13 avril 2013 était un coup de semonce car les élections municipales de 2014 approchaient à toute allure.
Lors de cette journée historique du 13 avril 2013, prendre le pavé était la seule solution. La démonstration de force était favorable aux adversaires de ce projet portuaire : 150 personnes avaient montré que la démocratie locale est vivante et, surtout, que la manifestation était annonciatrice d’une bataille politique dure.
Ensuite, le coup de tonnerre
Une décision essentielle est venu du maire de Villennes-sur-Seine. « C’est un NON catégorique » au conseil municipal de Villennes. Le 11 octobre 2013, il avait adopté une délibération contre l’implantation du Port de Triel dans la Communauté d’agglomération 2 Rives de Seine. Les élus avaient créé un coup de tonnerre politique et économique alors que le commissaire-enquêteur attendait avec impatience le vote de ce conseil municipal.
En parallèle, le leadership s’était constitué autour d’Anthony Effroy, conseiller municipal de Carrières-sous-Poissy, et une association ad-hoc pour mener la bataille sur le plan de la communication et des actions sur le terrain. Une nouvelle association pour la défense de l’environnement avait vu le jour en 2014 : Rives de Seine Nature Environnement ! Anthony Effroy avait décidé de se battre d’une manière transversale sur le territoire des 2 Rives. Il a su comprendre et agir pour défendre le site (et la Nouvelle Marina Port Saint Louis de Carrières-sous-Poissy, exploitée par Michel Gatta) avec tous les moyens juridiques et médiatiques, en mettant en avant la biodiversité et l’état de droit dans ce territoire qui fait l’objet d’un enjeu économique et foncier d’une ampleur sans précédent.
De camouflet en camouflet, le projet a commencé à s’affaiblir. La commission permanente du Conseil régional d’Île-de-France avait, lors de sa réunjion du 8 octobre 2015, renvoyé le vote sur la subvention de presque 4 millions d’euros pour le projet de Port industriel de Triel. Ce renvoi était le résultat de la pression politique et du travail du groupe Europe Ecologie Les Verts (EELV) au conseil régional. De nouvelles études d’impact sanitaire et environnemental avaient été demandées ; elles allaient conditionner les premiers travaux. Dans l’attente, ils étaient reportés. Le projet avait pris encore un coup.
Pour relancer la machine, le politique et le maître d’ouvrage se sont engagés sur le terrain des manifestants. Le 4 juillet 2014 le président de la CA2RS, Philippe Tautou, avait réaffirmé son intention de créer le port industriel. Il politisa le débat en affirmant que « le choix des élus [était] favorable au port ».
Justement les riverains, devant la Fabrique 21, dont l’aménagement par les promoteurs de ce projet est symbolique, n’avaient pas lâché le morceau : ils demandèrent des comptes et même de la transparences sur des projets saucissonnés tel le Pont d’Achères, la liaison RD30-RD190, la déviation de la RD 154… Ils mettaient en évidence l’aberration environnementale du Port industriel de Triel en remplacement de l’actuel port de plaisance. Le porte-parole de ces riverains, Anthony Effroy, d’une manière directe, et Charles Hedrich, explorateur et aventurier, se sont adressés à la foule pour réitérer leur détermination pour « garder la Marina » actuelle, un lieu unique entre Rouen et Paris.
Tous au combat politique
D’une manière prémonitoire, Pierre Cardo, ancien président de la CA2RS, avait senti le vent changer, le 17 décembre, lors de l’une des premières réunions publiques, à Triel-sur-Seine, au sujet du port : les associations et les riverains « n’étaient plus dans la concertation, mais plutôt dans le combat politique ».
De cette confrontation politique, M. Tautou, ancien président de GPS&O (et de la CA2RS), M. Rouque, directeur de Haropa, sont les perdants qui n’ont pas su appréhender les enjeux environnementaux et politiques de ce projet dans un territoire fragile.
D’autres projets inutiles et coûteux doivent être abandonnés
Après plus de 12 ans de combats et de procédures juridiques, citoyens, associations et élus « peuvent enfin respirer ». Face à la persistance de l’opposition locale, le projet de port industriel de Triel-sur-Seine a été abandonné par Haropa.
En effet, cet établissement public a décidé de renoncer à la création d’un port à déchets en lieu et place de l’actuelle Nouvelle Marina Port Saint Louis de Carrières-sous-Poissy. Ses représentants l’ont annoncé, le jeudi 27 octobre 2022, lors d’une réunion avec Jean-Pierre Laigneau, maire de Villennes-sur-Seine, et Christine Hanon-Batiot, conseillère municipale.
Les habitants de Carrières-sous-Poissy, de Médan, de Triel-sur-Seine et de Villennes-sur-Seine « échappent ainsi aux lourdes nuisances qu’aurait engendrées cette plateforme portuaire. » Selon M. Effroy, « la mobilisation aura donc fini par payer… L’abandon de ce vieux projet est source d’espoir pour tous les combats environnementaux menés sur notre territoire : projet A104 et pont d’Achères, projet de contournement de la RD154, PSMO, requalification de la RD190, aire de grand passage ou encore le projet d’usine de méthanisation Cométha… La lutte n’est pas terminée, mais la valorisation de notre qualité de vie est à portée de main. »