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Jules Verne et les wokistes

par | 28 mai 2024 | Culture, Triel-sur-Seine

Jules Verne vic­time col­la­té­rale du pro­jet de Cité de l’I­ma­gi­naire, ex-Arbre aux Hérons, à Nantes (DR)

Passion­né de l’œuvre de Jules Verne, je me dou­tais qu’un de ces jours la tri­bu wokiste s’at­ta­que­rait à cette grande figure de la lit­té­ra­ture fran­çaise. Vous l’i­gno­rez, Jules Verne était « sexiste », « racia­liste » et « colo­nia­liste ».

A pro­pos d’un pro­jet de Cité de l’imaginaire sur la com­mune de nais­sance de Jules, un col­lec­tif d’écologistes oppo­sés au pro­jet a pos­té sur sa page Face­book « son oppo­si­tion réso­lu (sic) à ce pro­jet toxique, coû­teux, anti-éco­lo­gique, résul­tat de la métro­po­li­sa­tion que nous subis­sons etc. » Dénon­çant « l’in­ven­tion d’une fake-culture basée sur un exo­tisme de paco­tille et sur un (re sic) culture lit­té­raire colo­nia­liste. », il en vient à s’at­ta­quer sans nuance à l’au­teur des Voyages Extra­or­di­naires sur lequel s’ap­puie  le pro­jet de Nantes Métro­pole …

Les wokistes épinglent main­te­nant Jules Verne !

Dans les lignes qui suivent, je ne vais pas dis­cu­ter du pro­jet que je me gar­de­rai bien de cri­ti­quer n’étant d’ailleurs ni nan­tais, encore moins ori­gi­naire de l’ancienne com­mune de Chan­te­nay. De toute façon, ce n’est pas mon sujet. Ce qui me cha­grine, c’est cette vin­dicte sys­té­ma­tique et sans nuance qui s’empare d’esprits ren­fro­gnés, promptes à abi­mer, salir, gifler ce qui doit être exclu, atti­tude fruit d’un esprit de sys­tème sim­pliste, réduc­teur et méchant. L’esprit de nuance qui est l’apanage des gens aimables et bien éle­vés a dis­pa­ru ! Et du coup le mien aus­si dis­pa­raît en réagis­sant à une telle sen­tence à l’emporte pièce ! Qu’avaient-ils à s’en prendre à Jules Verne ? Ne pou­vaient-ils pas régler leur dif­fé­rend autre­ment ? Car enfin l’au­teur de Voyage au centre de la terre mérite tel­le­ment mieux !

Jules Verne, racia­liste ? Chantre du colo­nia­lisme ?

Autre­ment dit, est-ce que cet écri­vain, dans ces ouvrages, tend à répandre une doc­trine qui affirme l’exis­tence de races humaines dif­fé­ren­ciées et non pas une espèce humaine unique ?
Rien qu’à l’é­non­cé de la défi­ni­tion, on réa­lise la bêtise d’une telle affir­ma­tion ! Car enfin, sans pro­cé­der à une exé­gèse com­plète de ses 64 voyages extra­or­di­naires, ses romans d’a­ven­tures scien­ti­fiques et geo­gra­phiques ins­pirent bien d’autres sen­ti­ments. La lec­ture de JV nous émer­veille, nous pro­cure éva­sion et rêve. On se sent embar­qué, accom­pa­gnant les héros et héroïnes, rele­vant les défis de la nature grâce à leurs talents d’inventeurs et d’ingénieurs plein de res­sources.
Ces contemp­teur peu avi­sés, savent-ils seule­ment que Nemo qui pré­fère échap­per au monde est, comme le dévoile les der­niers cha­pitres de L’île mys­té­rieuse, un prince hin­dou spo­lié qui se venge du colo­nia­lisme bri­tan­nique ! Il y a bien ici ou là quelques pas­sages, notam­ment dans Hec­tor Ser­va­dac, la figure du juif Isac Hakha­but, qui font vrai­ment tiquer.
Alors fran­che­ment faut-il pros­crire la lec­ture de JV parce que par-ci, par-là, dans quelques romans on trou­ve­ra des pré­ju­gés rele­vant aujourd’­hui du racisme, ou d’un pater­na­lisme com­plè­te­ment dépla­cé ? Dans Cinq semaines en bal­lon, les voya­geurs en bal­lon entre Zan­zi­bar et Saint-Louis du Séné­gal, il y a évi­dem­ment le juge­ment de Samuel Fer­gus­son com­pa­rant les nègres et les singes, à l’avantage de ces der­niers.
Faut-il pour autant ran­ger JV dans un nou­vel index ? Tout juste faut-il le savoir, l’expliquer sans le jus­ti­fier. En y réflé­chis­sant, on peut sou­te­nir qu’il s’agit d’un roman de l’ignorance. Les voya­geurs en bal­lon tra­versent l’Afrique d’est en ouest en 1860 en sur­plom­bant cette ter­ra inco­gni­ta (pour les euro­péens) sans ren­con­trer les afri­cains. Peut-être se seraient-ils dégros­sis en ren­con­trant vrai­ment ces autres humains ; mais, en les sur­vo­lant, ils ne pou­vaient que confor­ter leurs pré­ju­gés très lar­ge­ment répan­dus dans les socié­tés euro­péennes à l’époque. Jules Verne livre ici un témoi­gnage des men­ta­li­tés de son temps. Aux XX° siècle, dans les années trente, un eth­no­logue et afri­ca­niste fran­çais connu pour ses tra­vaux sur les Dogons, Mar­cel Griaule, contri­bue­ra à révi­ser les men­ta­li­tés. Lire à ce sujet L’Afrique Fan­tôme, le car­net de voyage de Michel Lei­ris qui l’accompagna dans ces pas­sion­nantes péré­gri­na­tions. Au lieu de les sur­vo­ler comme on observe un pla­ni­sphère, ils vinrent à leur ren­contre à pied et apprirent à les connaître.

Jules Verne, expes­sion du « capi­ta­lisme pré­da­teur. » ?

Celui qui emploi ces termes défi­ni­tifs, a‑t-il sim­ple­ment lu Sans des­sus des­sous (1889) ou bien Les Indes noires (1877) ? Dans le pre­mier, JV nous raconte avec beau­coup d’hu­mour com­ment des indus­triels et finan­ciers s’ap­pro­prient les zones arc­tiques ; au moyen d’un canon ultra puis­sant pro­jetent, heu­reu­se­ment au final échouent, de modi­fier l’in­cli­nai­son de la terre pour expo­ser les glaces au soleil et, ain­si, exploi­ter les gise­ments de char­bons qui sont sous la calotte. Il n’y a pas plus éco­lo­giste qu’un tel roman. Tou­jours à pro­pos de l’ex­ploi­ta­tion du char­bon, le second roman cité, comme anti­dote au capi­ta­lisme, décrit une com­mu­nau­té humaine exploi­tant une mine en Écosse et vivant à la façon d’un pha­lan­stère, bref par­tagent les res­sources. Ces deux récits sont loin d’être des excep­tions, alors Jules Verne sym­bole d’un capi­ta­lisme pré­da­teur ?

Jules Verne, sexiste ? 

 Jules Verne est un auteur du XIX° siècle. Peut-on rétro­pec­ti­ve­ment le qua­li­fier de sexiste ? Que les hommes s’at­tri­buent le meilleur rôle dans ces romans, c’est évident ! Mais encore une fois, ces livres témoignent d’une époque. Est-il pour autant ouver­te­ment machiste ?  Encore une fois ce n’est pas son sujet. Il quelques per­son­nages fémi­nins remar­quables. Ain­si Nadia dans Michel Stro­goff, autre­ment la plu­part des femmes sont, sans sur­prise, assi­gnées au rôle d’é­pouse ou de fian­cée. On peut le qua­li­fier ici d’é­cri­vain confor­miste pour des récits qui s’a­dres­saient à la jeu­nesse, il n’y figure évi­de­ment aucune trace de pré­da­teur sexuel. Ca va sans le dire !

Les lec­teurs et lec­trices d’au­jourd’­hui, doit-on les pri­ver de Jules Verne ?  Sont-ils à ce point niais qu’il fau­drait les pri­ver de ces romans extra­or­di­naires. Ou à l’ins­tar de Mein Kampf, four­rer ces romans de notes de bas de page ? 

Quant au pro­jet por­té par la ville de Nantes, j’ai comme l’im­pres­sion que son pro­jet de Cité de l’imaginaire, se ser­vant de Verne comme ali­bi, témoigne jus­te­ment d’un vrai manque d’i­ma­gi­na­tion. L’univers de Verne relève davan­tage du voyage per­son­nel, qua­zi men­tal, dans les connais­sances geo­gra­phiques et scien­ti­fiques de son époque. Cela n’a rien à voir, c’est à redou­ter, avec une vague déam­bu­la­tion dans un lieu dit cultu­rel recy­clant, comme tou­jours à son sujet, tout un tas de pon­cifs et de lieux com­muns.

En conclu­sion, les par­ties en conflit ont-elles bien lu et com­pris les romans de Jules Verne. Elles s’accrochent cha­cune à des idées reçues pour s’opposer sur la des­ti­na­tion à don­ner à une friche.
Il y avait le pro­jet, aban­don­né car jugé exces­si­ve­ment cou­teux, de L’arbre aux hérons, mais c’est une autre his­toire …

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