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De la Fête des mères à la Fête des fleuristes

par | 7 juin 2020 | Culture

Fête des mères fête des fleu­ristes (DR)

Confi­ne­ment ou décon­fi­ne­ment la Fête des mères célèbre encore cette année, les mères de famille lors du dimanche 7 juin en fonc­tion de la date de la Pen­te­côte. Cette fête devint natio­nale par une loi du 24 mai 1950 mais elle exis­tait bien avant.

Des actions ponc­tuelles pour rendre hom­mage aux mères de familles nom­breuses eurent lieu à par­tir de 1897. Une Jour­née des mères, ins­ti­tuée en 1919 pour célé­brer les femmes méri­tantes dans dif­fé­rentes grandes villes, fut pro­mue jour­née natio­nale en 1941 par le maré­chal Pétain qui vou­lait encou­ra­ger la nata­li­té. Elle s’ins­pi­rait du modèle amé­ri­cain de la Fête des mères, célé­brée en 1911 dans presque tous les États de l’U­nion et deve­nue offi­cielle en 1914 sous la pré­si­dence de Wil­son à la demande d’une ins­ti­tu­trice de Phi­la­del­phie : Anna Jar­vis pleu­rait le décès de sa mère et repre­nait elle-même une idée lan­cée à Bos­ton en 1872 par Julia Ward Howe.

D’autres mani­fes­ta­tions hono­raient les mères anté­rieu­re­ment. En Europe, on célé­brait la fécon­di­té au retour du prin­temps, lors d’une jour­née réser­vée aux épouses : par exemple, à la Sainte-Agathe, le 5 février, ou au moment du car­na­val, la jour­née des marottes. Dans la logique de cette période qui encou­rage les inver­sions, les femmes com­man­daient !

Le 1er mars, dans la Rome antique, la fête des Matro­na­lia célé­brait les femmes mariées, lit­té­ra­le­ment « celles qui ont une des­cen­dance (!) ». Comme le remar­quait l’é­ru­dit latin Aulu-Gelle au pre­mier siècle de notre ère, c’est de « mère » que vient le mot « mariage ». Pré­texte de réunions fami­liales, la Fête des mères est sou­vent mar­quée par un grand repas. Les maris et les enfants offrent des cadeaux aux mères (fleurs, bijoux fan­tai­sie, gâteaux, par­fums…) et les plus petits récitent par­fois un com­pli­ment appris à l’é­cole, en remet­tant un cadeau fait de leurs mains (des­sin, boîte à bijoux, broche, col­lier de perles, de hari­cots ou de nouilles, cadre…) ; tous ces sou­ve­nirs confec­tion­nés à l’é­cole ou à la mai­son auront la plus grande uti­li­té dans l’histoire fami­liale.

Cette fête est éga­le­ment célé­brée par les adultes de tous âges pour hono­rer leur mère. La créa­tion d’un Mother’s Day aux États-Unis par le pré­sident Woo­drow Wil­son, le 9 mai 1914, répond à deux objec­tifs. D’une part il s’a­git d’é­ta­blir une jour­née de recon­nais­sance des mères de famille au niveau fédé­ral puisque la publi­ciste de Phi­la­del­phie, Anna Jar­vis, a mul­ti­plié les ini­tia­tives en faveur d’une Jour­née des mères depuis 1905 et que la plu­part des états des États-Unis ont rati­fié sa demande. D’autre part le pré­sident des États-Unis cherche à ras­sem­bler le peuple amé­ri­cain divi­sé par des ten­sions euro­péennes qui accen­tuent les sen­ti­ments anti-alle­mands et qui abou­tissent quelques mois plus tard au déclen­che­ment de la Pre­mière Guerre mon­diale en Europe. Anna Jar­vis voit ain­si abou­tir cette fête com­mé­mo­ra­tive des mères qu’elle s’é­tait enga­gée à mettre sur pied à la mort de sa propre mère, Ann Jar­vis (Ann Maria Reeves Jar­vis), le 8 mai 1905.

Anna Jar­vis, la fon­da­trice vou­lait accom­plir le vœu de cette mère modèle qui avait déjà envi­sa­gé le 28 mai 1876 la créa­tion d’un Mothers Friend­ship Day (jour de l’a­mi­tié pour les mères). Cette mère exem­plaire avait œuvré, sa vie durant, pour amé­lio­rer le sort des femmes grâce à des clubs d’en­traide (fille de pas­teur métho­diste, elle s’é­tait inves­tie dans la com­mu­nau­té parois­siale de Graf­ton en Vir­gi­nie occi­den­tale) et celui de leurs enfants en créant les Sun­day schools pour les caté­chi­ser, les édu­quer et éra­di­quer les fléaux sani­taires (épi­dé­mies, alcoo­lisme, mor­ta­li­té infan­tile…) mais aus­si pour récon­ci­lier les familles déchi­rées par les années de la guerre de Séces­sion.

Depuis sa créa­tion au début du XXe siècle, la Fête des Mères est deve­nue assez vite très com­mer­ciale et a même sus­ci­té des cri­tiques de la part de sa créa­trice, Anna Jar­vis. Celle-ci a inten­té divers pro­cès contre des socié­tés com­mer­ciales et mani­fes­té contre cette récu­pé­ra­tion mer­can­tile de la jour­née dévo­lue à chaque mère. Elle s’at­taque aux fleu­ristes en 1922 et les traite de « pro­fi­teurs » dans la presse. En 1923, elle per­turbe un congrès de la confi­se­rie de détail puis s’en prend à l’as­so­cia­tion fémi­niste The Ame­ri­can Mothers qui vend des œillets pour col­lec­ter des fonds au béné­fice des anciens com­bat­tants de 1917–1918. Il n’y a pas de petites occa­sions pour récol­ter de l’argent. En 1934, elle fait un pro­cès aux Postes amé­ri­caines pour l’é­mis­sion d’un timbre qui célèbre la Fête des mères (tableau de James Whist­ler) et elle pour­suit Elea­nor Roo­se­velt, la très fémi­niste épouse du pré­sident Frank­lin D. Roo­se­velt, pour ses œuvres cari­ta­tives qui sont sous le sceau de la fleur d’œillet. Elle meurt rui­née en novembre 1948, hos­pi­ta­li­sée dans un sana­to­rium depuis quatre ans.

Aujourd’hui, la Fête des mères a été tota­le­ment com­mer­cia­li­sée et, en ces temps de post confi­ne­ment, elle per­met­tra sur­ement de ren­flouer les caisses de com­mer­çants qui en ont bien besoin. Tout compte fait, le 28 juin pro­chain ce sera pour cer­tains encore la fête des … maires, mais c’est une autre his­toire qu’il sera temps de conter entre deux essayages de masques qu’il ne fau­dra pas oublier !

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